Le sport congolais est sûrement entrain de connaître l’une de ses plus grandes crises de l’histoire. De la non-homologation par la CAF du stade des Martyrs de la pentecôte, aux échecs à répétition de nos clubs et de notre équipe nationale dans les compétitions sportives continentales, en passant, par la menace de l’arrêt définitif du championnat national, l’univers sportif congolais se trouve désormais dans une situation alarmante qui nécessite des profondes et urgentes solutions.
Que faut-il faire pour redresser les choses ? Qui est le principal responsable de cette situation ? Le mécène de la jeunesse et des sports congolais, Ya Santé Mulongoyi a répondu aux questions de la Rédaction de Pepele News dans une interview exclusive.
Au micro de notre intervieweur Jonathan Gambi, le Président de la structure « Allez-y les Léopards », est également revenu sur d’autres sujets faisant la une de l’actualité au niveau national.
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Jonathan GAMBI | Avec près de 40 ans d’expérience dans le domaine sportif en RDC, quel diagnostic faites-vous de la situation que traverse le sport congolais actuellement ?
Ya Santé MULONGOYI | Nous avons un problème sérieux d’acceptation entre nous sportifs, avec ce lot de nouveaux venu, qui a intégré notre mouvement sportif dans les années 2008, il y a eu une montée d’hypocrisie, de méfiance, du tribalisme et de haine. Ces dirigeants qui arrivent en tête de notre discipline, ne sont là que pour tout d’abord bloquer les différentes initiatives que nous amenons. C’est ce qui nous empêche de relever le défi aujourd’hui. Hier toute l’Afrique avait peur de notre pays, et tremblait avant de nous affronter dans les différentes compétitions sportives, mais aujourd’hui ce n’est plus le cas, à cause d’un manque criant d’organisation.
J.G | Qui en est le responsable, le ministère des Sports ou la FECOFA ?
YSM | Le problème se trouve dans toutes les structures qui dirigent le sport congolais. Déjà le ministère des Sports et la FECOFA semblent ne pas s’entendre, à titre d’exemple, lors de notre élimination contre le Maroc, j’ai personnellement suivi notre secrétaire générale adjoint Monsieur MANGENDA, qui a vivement critiqué le ministre des Sports et appelant même à son départ. Alors quand le ministère des Sports et la FECOFA ne s’attendent pas, vous vous attendez à quel résultat ? C’est pourquoi nous disons qu’il y a un défi majeur pour notre Chef de l’État, ce défi n’est rien d’autre que de transformer l’Homme congolais, car il est vraiment malade dans sa manière de faire les choses. Même nos clubs sont sérieusement malades, regardez ce qui est arrivé à Mazembe et d’autres équipes congolaises, hier, dans les différentes compétitions africaines de football.
J.G | Est-ce que l’équipe nationale congolaise est-elle épargnée de cette situation ?
YSM | Le problème va même au niveau de l’équipe nationale, là également il y a un sérieux manque d’amour et de patriotisme – dans les mouvements et structures sportifs -, lors de notre match contre la Tunisie (Ndlr. Match des éliminatoires Coupe du monde Russie 2018), nous étions chez l’ancien ministre des Sports, Dénis Kambayi, accompagné de l’honorable Patsho Panda, malheureusement on l’a jamais rencontré et il y a certaines personnes qui ont été un tout petit peu « frustrées ».
Récemment encore contre le Maroc (Ndlr. Match de barrage des éliminatoires Coupe du monde Qatar 2022), il y encore eu un manque d’organisation alarmant.
J.G | Depuis peu, le championnat national de football est menacé d’arrêt suite notamment aux problèmes financiers, pensez-vous qu’il existe une alternative pour l’éviter ?
YSM | Sur le plan du Championnat national (Ndlr. LINAFOOT), quoi que l’on fasse avec l’actuel système, il ne se terminera pas, à cause d’un total manque de sérieux. J’ai pensé rencontrer le ministre des Sports, pourquoi pas la FECOFA, pour changer le système du déroulement du championnat national en revenant à l’ancien système de la LIFKIN, car avec ce système les équipes jouaient convenablement avec deux à trois matchs par semaine, au lieu d’un par mois avec la LINAFOOT. Mais malheureusement je n’ai obtenu gain de cause.
J.G | Le 09 février dernier, les congolais apprenaient avec stupeur la non-homologation du Stade des Martyrs de la pentecôte empêchant ainsi les Léopards de jouer leur match prévu fin-mars contre la Mauritanie à domicile, comment analysez-vous cette mesure de la CAF ?
YSM | J’ai suivi Jean-Marie Kassamba hier dimanche, dans une émission à la télévision, parmi ses invités, il y a eu l’un deux qui a argumenté une thèse très sérieuse. Il faut interpeller même les 5 derniers ministres qui sont passés à la tête du sport congolais, puisqu’ils ont reçu l’argent de l’État mais n’ont pas fait des travaux qu’il fallait, donc c’est de leur faute et doivent répondre de ce qu’ils ont entrepris pour rénover le Stade des martyrs.
Car cette situation fragilise même notre football, vous avez vu nos équipes jouer à l’étranger – V.Club à Brazzaville, DCMP à Luanda, Lupopo à Lusaka – et les résultats n’ont visiblement pas suivi. Mais aussi pourquoi ces équipes ont boycotté de jouer au Stade de Mazembe à Lubumbashi ? Ce n’est un signe flagrant d’un manque d’amour. Et là, nous avons des conséquences, nous enregistrons des défaites de part et d’autres, nous n’avons plus un bon niveau sur la scène continentale et on ne gagne plus rien. Si nous nous retrouvons dans cette situation, c’est parce que, c’est l’Homme congolais qui tue le sport congolais.
J.G | Depuis hier soir, le Président de la République, Félix Tshisekedi séjourne à Genève, où il a pris part aujourd’hui à la 52ème session du Conseil des Droits de l’homme de l’ONU. Ce voyage semble « être de trop » selon certains observateurs. Êtes-vous de cet avis ?
YSM | Comment voulez-vous que le Président entre en contact avec les partenaires étrangers ? C’est à partir de sa chambre ou son bureau ? Non ! Par exemple, c’est grâce à des voyages que le Président Tshisekedi a pu débloquer la mesure restrictive de l’embargo sur les armes imposées à la RDC par les Nations unies. Le pays n’est pas un bien exclusif du Président de la République, si on perd un territoire aujourd’hui, c’est tous congolais qui seront concernés et non seulement Félix Tshisekedi.
Si le pays est en difficulté c’est à cause de nous tous, nous manquons du patriotisme. Lorsque nous sommes attaqués c’est tout le Congo, l’opposition y comprise. De ce fait, il faut qu’on se mette tous ensemble pour y réfléchir et trouver des solutions adéquates.
J.G | La semaine dernière et même aujourd’hui, Pepele News est largement revenu sur la montée en puissance du banditisme urbain dit « kuluna » dans la capitale Kinshasa. Entant que mécène de la jeunesse, quelles pistes de solution proposez-vous ?
YSM | La solution pour éradiquer le banditisme urbain est claire, c’est-à-dire qu’il faut que l’État congolais accompagne ceux qui encadrent notre jeunesse, car ceux-ci sont capables de la gérer, mais si vous financer ceux-là qui viennent avec des projets éphémères, ce phénomène de Kuluna, continuera de s’accroître.
J.G | Monsieur MULONGOYI Ya Santé, serez-vous candidat aux prochaines élections de la présidence de la FECOFA ou envisagez-vous un positionnement pour accéder à la tête du ministère des Sports ?
YSM | Je ne serai pas candidat à la présidence de la FECOFA ou encore à un positionnement pour devenir ministre des Sports, s’il fallait l’être, je le serai depuis longtemps. Mais moi, mon objectif c’est de rester dans le mécénat et de continuer à soutenir ceux qui sont à la tête de ces institutions. Je n’ai pas reçu l’argent du gouvernement pour faire quoi que ce soit entant que mécène de renom de notre pays, mais j’ai quand même agit pour le bien du pays et pour ça j’en suis fier.